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Les deux pigeons par Alexandre Postel

Rentrée littéraire 2016, épisode 3. Cette fois-ci, ce sont Les Deux Pigeons d'Alexandre Postel qui sont venus se poser entre mes mains. L'histoire d'un couple qui fait son nid et prend ses ailes au fil de la vie et de l'ennui, voilà qui ne semble pas des plus palpitants. Enfin, à priori.



Août 2016
240 pages
19 €
ISBN 9782070179688


Résumé de l'éditeur
Théodore et Dorothée s’aiment d’amour tendre. Cela ne les empêche pas de s’interroger : comment se divertir? Se nourrir? Que faire de ces deux corps? À quoi se consacrer? Faut-il «fonder une famille», travailler, «s’indigner»? Comment font les autres? Autant de questions qui surgissent au fil de cette odyssée des manières de vivre.


Ne vous attendez pas à une histoire des plus romanesques dans ce livre. Pas de grandes aventures mais des événements du quotidien, des lubies et des échecs. Voilà ce qui fait l'intérêt de ce livre : ce couple, c'est nous, c'est vous, c'est tout le monde. A travers deux individus, l'auteur interroge la société sur des thèmes assez triviaux : mariage, enfants, sexe, décoration d'intérieur, vacances et sorties... Tous les thèmes semblent être passés en revue le temps de dix ans de vie commune dans les années 2000.

Des lieux communs, donc, qui grâce à l'écriture d'A. Postel prennent un tour intéressant. L'ennui rend les deux personnages comiques malgré eux. Pris régulièrement de lubies et de coups de tête, ils changent d'avis comme de chemise et rêvent en technicolor lorsqu'ils font un projet. Ils ne savent pas écrire, mais ils imaginent déjà la résidence secondaire qui va avec le statut d'écrivain. Ils n'ont pas les moyens, mais ils font les magasins de décoration de luxe. Les exemples ne manquent pas dans ce livre.

D'ici quelques années [...], Théodore serait parlementaire ou secrétaire d'Etat ; rayonnant, courtisé par de jeunes actrices, il volerait de festival en inauguration dans un hélicoptère de la République.

Risibles à leur corps défendant, ils sont néanmoins attachants, eux qui se rassurent comme ils peuvent dans un discours ironique et même critique vis-à-vis de la société. L'ironie ne manque pas de la part de l'auteur non plus : son collègue M. Houellebecq n'est pas épargné, ce qui donne lieu à des passages assez mordants et jouissifs. Et puis, voilà un roman qui pose des débats modernes et se moque gentiment (ou pas) de certaines opinions. Fine et mordante, l'écriture ose sans complexe. Une femme doit-elle bannir la jupe pour éviter les ennuis ? Et le mariage pour tous, alors ? Bébé "aimerait-il avoir deux papas ? Surtout pas, Seigneur, surtout pas ! Parce qu'il n'y aurait plus personne pour te préparer à manger, hein, mon petit canaillou ?" 

Mais une question latente parcours ce texte : peut-on être heureux à deux ? A. Postel nous offre une vision assez négative et pessimiste du couple, qui "est un théâtre où on se fait la comédie" Le couple, c'est "deux pigeons exposés aux chasseurs, aux pièges, au grand prédateur qui, là-haut dans le ciel, attend son heure".

La faiblesse, l'apathie, l'inertie, l'épuisement, la culpabilité - voilà de quoi un couple était fait, voilà ce qui faisait tenir un couple !

Le ton est ironique mais aussi tendre avec ses personnages auxquels on finit par s'attacher. Ce n'est qu'en y réfléchissant après ma lecture que je m’aperçois de la dose de cynisme contenue dans ces pages. Parce que je me suis finalement attachée à Théodore et Dorothée : eux, c'est nous, leur quotidien et leurs peurs sont aussi les nôtres. Quels choix faut-il faire pour réussir sa vie ? Pourquoi reste-on avec quelqu'un ? Ces questions sont centrales dans ce roman.


A lire pour réfléchir sur la société moderne, pour une adresse littéraire qui fait de la banalité quelque chose qui mérite d'être dit.
Je recommande !




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