La ligne verte par Stephen King
On connait tous le célèbre film avec la prestation magistrale de Tom Hanks - eh bien moi, non. Voilà pourquoi j'ai choisit de lire le roman pour commencer. J'apprécie l'écriture de Stephen King, que j'ai découvert dans Salem ou Ça et je remarque que dans La ligne verte, le style est le même, mais le genre diffère radicalement. Le fantastique ici est à placer à l'arrière plan, même s'il sert à l'histoire.
L'histoire est racontée par un personnage-narrateur, le gardien chef du bloc des condamnés à mort, ce qui limite les points de vue mais permet de donner une réelle profondeur aux sentiments du personnage. Dans le bâtiment des condamnés à mort, pas de froideur : au contraire, les émotions règnent. Celles des surveillants comme celles des prisonniers. Le personnage qui m'a le plus ému est, sans réelle surprise, le condamné à l'origine du roman : John Caffey. Dans la douceur et la simplicité de ce géant, je retrouve le caractère de Lennie Small, le personnage de John Steinbeck dans Des souris et des hommes. Même si l'un est coupable et l'autre non, je ne peux m'empêcher de faire le lien entre les deux hommes : une même sensibilité les anime. John Caffey est un géant avec des mains énormes, mais avec une âme d'une douceur incroyable.
Et puis, il y a cette fameuse souris, Mister Jingles, qui semble plus humaine que certains hommes. Douée d'une intelligence peu commune, elle est la fidèle compagne du prisonnier Delacroix qui lui apprend des tours de cirque. Cette souris apporte fraîcheur et sourire dans un roman qui en a bien besoin. Jusqu'au bout, elle continue à jouer, dans la nostalgie de son ami adoré, mort sur la chaise.
Delacroix s'est penché en avant et a fait rouler la bobine sans fil sur le sol de la cellule. Elle roulait facilement, comme une paire de roues montées sur un axe. La souris a bondi de sa boîte en un éclair de poils gris et a couru après comme un chien allant chercher la baballe. J'ai poussé une exclamation de stupeur, et Delacroix s'est fendu d'un grand sourire.La bobine a heurté le mur et a rebondi. Mister Jingles en a fait le tour et a entrepris de la rapporter jusqu'à la couchette, poussant de droite ou de gauche, dès qu'elle déviait de sa course. L'instant d'après, le petit rouleau touchait le pied de Delacroix.
Le style de Stephen King, comme toujours, est celui de l'épisode, du fragmentaire. Mais l'effet est encore plus marqué car, comme expliqué dans la préface, l'oeuvre a été écrite pour être éditée sous forme de feuilleton, à la manière de ces romans du XIX° siècle qui paraissaient, chapitre par chapitre, dans les journaux. Six épisodes se distinguent donc, chacun divisé en cours chapitres. La lecture est donc rythmée avec des effets d'attente qui poussent à tourner les pages et à ne pas lâcher le livre. Avec ce système d'écriture, des redites sont inévitables. Cependant, elles sont parfaitement intégrées au cour de l'histoire et sont dépassées par de nouveaux détails qui enrichissent le récit.
Avril 2008
512 pages
7,90 €
ISBN 9782253122920
Et le film alors ?
L'adaptation qui en a été faite en 1999 avec Tom Hanks dans le rôle de Paul Edgecombe rend toute la mesure de l'émotion portée par le livre. Plusieurs différences avec le roman se sont glissées dans l'adaptation - et c'est tant mieux, à quoi bon regarder une réplique totalement identique ? - mais l'ensemble reste assez fidèle.
Une des différences que j'ai retenu, c'est que l'époque où le gardien chef nous raconte sa vie est moins développé. Ainsi l'auteur introduisait un personnage, le double d'un gardien de prison vicieux, dans la maison de retraite. Il inversait de cette manière les rôles, mettant Edgecombe en position de faiblesse. Plus de cela dans le film...
Toutefois le film reste très fort, certaines scènes sont même insupportables à voir, celle de l'exécution ratée par exemple.
A lire pour connaître une oeuvre culte, pour des personnages entiers et attachants. A voir parce que, pour une fois, (à mon humble avis) le film est plus frappant que le livre, et plus mémorable aussi. Et vous, vous avez lu/vu La ligne verte ?